Exposition présentée à la Bibliothèque des Lettres de l’École normale supérieure du 7 juin au 6 juillet 2013.
C’est à l’âge de 48 ans que Jean-Paul Sartre (1905–1980) entreprend d’écrire une autobiographie, d’abord intitulée Jean sans terre, qui ne sera publiée que dix ans plus tard, en 1963–1964, sous le titre Les Mots. Dans ce texte à bien des égards (re)fondateur, dont nous fêtons le cinquantième anniversaire en cette année 2013, Jean-Paul Sartre règle plusieurs comptes : avec son enfance, celle que cet orphelin de père a menée, jusqu’à l’âge de 10 ans, entre ses grands-parents maternels, les Schweitzer, et sa mère, Anne-Marie ; avec la culture bourgeoise que son grand-père Charles Schweitzer a tenté de lui inculquer ; avec la littérature et l’écriture, enfin, inscrites dès l’origine au cœur de son projet de vie, perçues jusqu’à la cinquantaine comme l’unique moyen d’accéder à la gloire, de mener le combat, de se faire pardonner son existence et de lutter contre la mort. Lorsqu’il entreprend d’écrire l’histoire de sa vie, Jean-Paul Sartre ne croit plus au salut par la littérature. Il commence d’ailleurs par la condamner avec sévérité, avant d’atténuer cette condamnation. Il n’en demeure pas moins que son autobiographie fournit un magnifique témoignage du rapport fanatique que cet enfant-monstre, « en marche vers le génie ! », pour citer Annie Cohen-Solal, a développé avec les livres, la lecture et l’écriture dès son enfance ; un rapport entretenu durant ses années de lycée, de classe préparatoire, d’École normale supérieure, et partagé avec cet autre passionné de littérature qu’était Paul-Yves Nizan. Les registres d’emprunts de la Bibliothèque des Lettres de l’ENS entre 1924 et 1928 l’attestent : durant ses années normaliennes, qu’il qualifiera ensuite d’heureuses, et malgré sa réputation tenace et parfois méritée de trublion, Sartre a travaillé et lu avec acharnement : pour préparer son diplôme d’études supérieures, l’agrégation, ses premières publications, et, sans doute aussi pour le plaisir. Centrée sur la période 1905 – 1928, cette exposition s’efforce de mettre en espace lectures et écrits de Jean-Paul Sartre durant ses années d’apprentissage, lorsque la bibliothèque était encore pour lui « le monde pris dans un miroir » (Les Mots). | | © France de Ranchin, |
Exposition réalisée par Pascale Arauz-Aubrun, Estelle Bœuf-Belilita, Françoise Dauphragne, Nathalie Marcerou-Ramel, Amélie Molina, Nathalie Queyroux, David Schreiber et Gilles Sosnowski.